Lettre ouverte du 11 novembre

Publié le par Collectif pour la défense de la bibliothèque de l'Ecole Normale Supérieure

Lettre ouverte du 11 novembre, mise sur le site du collectif pour la défense de la bibliothèque de l'École Normale.

À Madame la Directrice de l'Ecole Normale Supérieure, Monique Canto-Sperber.
À Madame la Directrice de la Bibliothèque, Laure Léveillé.

Mesdames les Directrices,

Le Collectif pour la défense de la Bibliothèque a pris connaissance, avec intérêt, du courrier que vous avez adressé aux amis des Bibliothèques de lettres en date du 31 octobre. Nous le constatons avec satisfaction : vous pensez comme nous que la Bibliothèque n'a pas à être un service rentable, mais qu’elle doit demeurer notre patrimoine commun. Devant l’opposition massive rencontrée par la décision votée au CA du 16 octobre, votre lettre établissait un constat : un vaste mouvement d’indignation, par vous réduit à l’euphémisme d’un malentendu, avait répondu à l’instauration d’une taxe de 100 à 200 €. Or, toujours selon vous, la nécessité d’une taxe découlait d’un budget alarmant, la Bibliothèque ne disposant actuellement que de 400.000 euros. Pour trouver les 600.000 euros manquants, vous proposiez désormais de ne faire payer que les emprunteurs, tandis que la redevance de 200 euros ne concernait plus l'ensemble des autorisés, mais les «professeurs des universités américaines, essentiellement», selon vos termes.
Dans le même temps, une dotation exceptionnelle (qu'on nous présentait comme strictement impossible la semaine précédente) était généreusement octroyée: nous nous en réjouissons tout en considérant cela comme un premier pas, puisque la dotation globale a parallèlement plus que doublé grâce à vos efforts. Sacrifier le financement de la Bibliothèque à dotation constante aurait déjà suscité la surprise, le faire alors que la dotation vient de doubler suscitera, à n’en pas douter, l’incompréhension absolue. Nous avons ainsi quelques raisons d'espérer que votre générosité permettra d'augmenter encore cet apport inespéré, d'ici à ce que le budget soit bouclé.
Si vous le voulez bien, rappelons maintenant quelques faits établis, préalable propice à une discussion franche entre camarades.
Le 16 octobre, une séance du Conseil d’Administration a voté l'instauration d'une taxe annuelle pour les lecteurs de la Bibliothèque, caïmans exceptés. Le CA a voté sans débat élargi un texte fondamental. Il s'agissait d'un vote des seuls membres nommés, extérieurs à l’Ecole, contre ou sans les membres élus. De ces neuf membres nommés, cinq absents avaient donné procuration à leurs collègues.
Suite à cette décision contestable dans la forme comme sur le fond, le Collectif pour la défense de la Bibliothèque s’est mis spontanément en place à partir du 26 octobre. Il exprime sans aucun malentendu, rassurez-vous, la certitude que ladite décision altère profondément la nature de la Bibliothèque, et partant la mission de l’Ecole dont cette Bibliothèque est le coeur depuis Lucien Herr. En moins de 15 jours les signatures de soutien au Collectif se sont élevées à plus de 1300, avec des noms prestigieux en France et à l’étranger. Chaque jour de nouvelles adhésions nous parviennent.
Il reste le problème financier de la Bibliothèque, dont nous sommes alertés depuis longtemps. Nous exprimons ici le voeu qu’il puisse être clairement expliqué, sans réserve d’informations, et puis soumis à l’ensemble des lecteurs, sans conseils restreints. Permettez-nous d’observer que c’est manifester bien peu d’égards, bien peu de reconnaissance aux archicubes, et encore moins d’esprit normalien, que de se priver ainsi de leur soutien lorsque des décisions aussi graves sont prises. Toutefois vous nous avez fait savoir, malgré le vote, qu’«aucune décision n’était prise». À l’évidence nulle décision ne peut être prise contre une opposition puissante : il est donc souhaitable qu’elle ne soit pas exécutée. Nous en serions heureux, croyez-le, mais comment ne pas douter d’une promesse qui laisse planer un doute ? Nous préférons qu'elle soit complétée et consacrée par un engagement, ferme et fort de votre part, que la «décision non prise», mais bien votée, sera abrogée lors du prochain Conseil d’Administration. Le soutien des archicubes et celui des lecteurs passent par cet acte de franchise, qui rétablira l’unité de la communauté normalienne, communauté brisée par une crise grave et ouverte, que personne d’entre nous ne souhaite précipiter.
Toute discussion suppose la confiance et la confiance des lecteurs est entre vos mains. Vous vous donniez d’abord jusqu’en décembre, puis jusqu’en juin pour juger si nos dons combleraient un déficit inexplicable. Vous avez déclaré depuis vouloir «rétablir à tout prix la sérénité». Et tel est notre souhait. Le retour de la sérénité dépend maintenant de votre disponibilité concrète à évaluer ensemble les moyens de sauver la Bibliothèque sans taxation aucune, sur une base nouvelle et juste: l'annulation, au prochain CA, de la décision votée le 16 octobre.

Veuillez agréer, Mesdames les Directrices, la cordiale expression de nos sentiments normaliens.

Le Collectif pour la défense de la Bibliothèque de l'Ecole Normale Supérieure
collectifbiblio@free.fr

Publié dans Lettres et échanges

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